"La vie est belle" est un film osé et ambitieux car il a pour synopsis un sujet très délicat : le nazisme et les camps de concentration. Jusqu'ici, aucune comédie sur la Seconde Guerre mondiale n'avait choisi pour cadre les camps de la mort. Comment Roberto Benigni a-t-il réussi à faire rire tout en dénonçant cet épisode peu glorieux de l'histoire ?
En 1949, Adorno posa la question de savoir si l’on pouvait encore faire de la poésie après Auschwitz. Quarante-huit ans plus tard, Roberto Benigni lui répond à travers son film La vie est belle: oui, on peut faire de la poésie et de l’humour, après les camps, et même avec les camps.
La shoah
Le film
C’est l’histoire d’un homme, Guido, juif et Italien. Dans cette Italie de plus en plus antisémite, il mène sa vie avec entrain et insouciance jusqu’au jour où il rencontre par hasard une jeune femme, Dora, dont il tombe fou amoureux. De cette union idyllique naîtra un enfant, aussi vif et gai que son père. Ensemble ils filent le parfait bonheur jusqu’à ce que le père et le fils soit soudainement déportés dans un camp de concentration allemand. Dora refusera de les laisser partir, et entrera de son propre choix dans les camps de la mort… De là, Guido cachera avec brio à son fils ce qu’ils sont venus faire dans cet endroit peu conforme. Pour éviter qu’il ne prenne conscience de l’insoutenable réalité qui l’entoure, Guido invente un concept de jeu où le gagnant se verra attribuer un véritable char d’assaut, comme le jouet qu’il devait avoir le jour de son anniversaire. Après tout ce n’est qu’un voyage organisé...
Le dénouement de cette histoire est triste: Guido meurt en se faisant fusiller car il s’était déguisé en femme pour pouvoir apercevoir sa femme. Gosué qui s'était caché dans une sorte de cage pour ne pas se faire repérer, sort à la fin de l'histoire quand il n'y a plus de bruit comme le lui avait demandé son père. Il se retrouve alors devant le cadeau tant espéré : un véritable char d'assaut. Il monte dedans et sur la route, il retrouve sa mère... Tout au long le film est porté par un musique très émouvante de Nicola Piovani.
Faire rire pour parler de l'inhumain
Par sa grande créativité, Roberto Benigni parvient à créer des situations comiques sans tomber dans le grotesque. "La vie est belle" n'est pas une reconstruction historique mais une fable sur fond de toile historique. C'est aussi une belle histoire d’amour entre Guido et Dora ainsi qu'une relation père-fils exceptionnelle.
Ce film a remporté plusieurs prix notamment: trois Oscars (acteur principal, film étranger et musique) le César du film étranger, le Grand Prix du jury de Cannes en 1998, le prix du public aux festivals de Montréal, Toronto et Vancouver, le Neuf Donatello aux oscars italiens. Comment ne pas être ému par ce père qui permettra à son fils de traverser l'horreur sans peur et dans la bonne humeur ?
Au festival de Cannes, entre deux éclats de rires, le réalisateur italien dédiait sa récompense "à tous ceux qui ne sont plus là, disparus pour nous faire comprendre ce que sont la liberté et la vie".
Fils de déporté, Benigni, veut montrer que la shoah est avant tout absurde. L'humour est justement l'arme la plus redoutable contre la dictature. « La vie est belle » est un film à voir comme un devoir de mémoire. Sans nuire à la mémoire de tous les déportés, Roberto Benigni montre la volonté d'un père de ne pas mêler son fils à l'horreur de la situation et à lui laisser son innocence. La mort du héros principal est un véritable déchirement, qui laisse un sentiment d’injustice et marque profondément le spectateur. Il en ressort avec l’intime conviction qu’il ne faut pas laisser un tel système se mettre à nouveau en place.